Céline Clanet à Bordeaux

Depuis un quart de siècle, le festival « Itinéraires des photographes voyageurs » de Bordeaux a accompagné l’évolution de la photographie au rythme des révolutions techniques et stylistiques, en veillant à présenter les formes de photographies d’auteurs les plus diverses.

A partir du 1er avril, la 26e édition propose aux visiteurs d’effectuer leur propre itinéraire, au fil des 11 expositions présentées dans les principaux lieux culturels publics et privés de la métropole aquitaine, du Rocher de Palmer à Cenon, à la Salle Capitulaire Cour Mably au cœur de la ville, et de découvrir le travail de photographes professionnels confirmés ou issus de la nouvelle génération.

Je souhaite attirer votre attention sur Céline Clanet (née en 1977), Diplômée de l’Ecole Nationale Supérieure de la Photographie d’Arles en 1999, qui mène depuis 2005 un travail photographique personnel sur l’Arctique continental européen – plus connu sous le nom de Laponie – son territoire et ses populations.

C’est précisément sa série intitulée Máze sur un village Sámi situé en Laponie norvégienne qui est présentée dans le cadre du festival au Marché de Lerme.

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Depuis 2005, je me rends régulièrement à Máze, un village Sámi situé tout en haut de la carte européenne, au-delà du Cercle Arctique, en Laponie norvégienne. J’y ai rencontré des gens silencieux, parfois mélancoliques, très fiers de leur village et de leur territoire, de ces paysages qu’ils regardent inlassablement à travers des jumelles dont ils ne se séparent jamais, même à l’intérieur de leur maison.

J’ai photographié les gens, les maisons, les rennes et un territoire qui ne devraient plus être là aujourd’hui, noyés sous les eaux d’un barrage hydro-électrique planifié par le gouvernement norvégien au début des années 70, et qui fut heureusement abandonné, sous la pression et la résistance Sámi. Mais j’ai aussi photographié une réalité qui va sans doute se transformer de manière radicale dans le siècle à venir, à cause des ravages du réchauffement climatique et de l’acculturation.

Pour moi, Máze est le symbole ambivalent de la résistance et de l’impuissance.

Fierté, méfiance, silence et grande beauté y règnent.

Dans la plus belle toundra de tout l’Arctique, j’ai goûté à la saison préférée d’Ante et de Ole-Ailo, quand les jours ne cessent de s’allonger et que les températures s’adoucissent. Le moment idéal, quand le temps n’existe plus et que la nuit est partie, celui où ils plongent dans cette flânerie qui les caractérise tant : la pêche à travers un trou dans la glace du lac de Suolojávri, ou une ballade en scooter dans la toundra. Et ces longues heures passées avec ses amis, sa famille, dehors sur une peau de renne, dans une hytte ou sous un lávvu, à discuter, à joiker ou allongés à ne rien faire, à ne rien dire. Juste être.

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Cette série a remporté plusieurs prix en Europe et aux Etats-Unis, et a été exposé en France, Etats-Unis, Finlande, Norvège, Italie, Belgique, Suisse, Lituanie et Royaume-Uni. Elle a également été largement publiée dans la presse internationale.

Céline Clanet travaille actuellement sur la Laponie russe et la région de Mourmansk, projet pour lequel elle a obtenu Bourse pour la Photographie Documentaire du Centre Nationale d’Art Plastique.

Céline contribue à l’Observatoire Photographique des Pôles :

www.observatoirephotographiquedespoles.org

Du 1er au 30 avril 2016

Du mardi au dimanche de 13h à 19h

Marché de Lerme – place de Lerme – 33000 Bordeaux

 

 

Circulation(s) : mes coups de coeur

Marqué par le succès de l’édition 2015 au CENTQUATRE-PARIS avec plus de 47 000 visiteurs, , la 6ème édition du festival Circulation(s) revient pour une durée de 3 mois. Dédié à la jeune photographie européenne, ce festival propose de faire découvrir à un large public la création artistique contemporaine innovante. Autour des 51 photographes européens présentés, Little Circulation(s), l’exposition à hauteur d’enfants, revient cette année ainsi que son programme d’activités pédagogiques destinées au jeune public : des jeux inspirés par les oeuvres exposées sont proposés aux enfants afin d’accompagner leur visite de façon ludique et créative (jeu de memory, jeu des 7 erreurs, jeu de logique …).

J’avais apprécié et commenté cette belle idée l’an dernier ici même :

https://agnesvoltz.wordpress.com/2015/01/26/festival-circulations/

Cette année, mes coups de cœur vont vers 2 auteurs très différents.

Lilly Lulay, née en 1985 à Francfort, est une photographe qui ne réalise qu’à de rares occasions ses propres images. Son travail s’adosse en grande partie sur la collecte de clichés anonymes ordinaires trouvés au gré de ses déplacements, à partir desquels elle compose un monde mêlant urbain et nature, couleur et noir et blanc, sous la forme de photo-collages, oeuvres étonnantes par leur cohérence visuelle et leur abstraction.

Mindscapes Nr.50 2011

La série exposée s’intitule Mindscapes, , jeu de mots entre mind, esprit, et landscapes, paysages.

Les «Mindscapes» sont une série de collages en cours, sur laquelle je travaille depuis 2007. Avec comme point de départ les photographies privées de divers moments et contextes, je crée des scènes appartenant au monde intérieur de la mémoire et de l’imagination; un monde auquel aucun appareil photo n’a d’accès: les paysages de l’esprit. Travailler sur cette série est un processus constant de recherche et de jeu autour des motifs de la perception humaine, qui nous obligent à identifier même les éléments flous comme des objets familiers de notre mémoire visuelle.

Non rephotographiés, donc pièces uniques, les collages laissent apparaître la matière, le processus et un relief qui sollicitent le sens du toucher. Les images recyclées en paysages résultent d’une réappropriation et d’une réinterprétation de ce que d’autres ont vu et photographié, puis abandonné ou vendu. Des images délaissées, qui, sous ses mains, reprennent vie de manière poétique et fictionnelle.

Benjamin Renoux déjà remarqué au dernier Salon de Montrouge.

https://agnesvoltz.wordpress.com/2015/05/07/benjamin-renoux-a-voir-au-salon-de-montrouge/

Né en 1986 à Abidjan (Côte d’Ivoire), Benjamin Renoux travaille entre Paris et Londres.

Tondo consiste en une série de vidéos de format rond, présentées dans des cadres sculptés façon Renaissance, démarche très originale. Le tondo est un format de peinture circulaire devenu populaire à la Renaissance. Il était surtout utilisé pour des portraits et des représentations de Vierge à l’Enfant.

Benjamin Renoux reprend ce gabarit pour son travail sur le « stade du miroir », c’est-à-dire le moment où l’enfant reconnaît pour la première fois son reflet dans la glace. Les vidéos présentent le reflet de l’artiste parlant à des photographies. La conversation demeure inaudible dans le but d’en préserver l’intimité. Tondo est le moyen pour Benjamin Renoux de juxtaposer les espaces-temps : celui de la photographie, celui du reflet et celui du spectateur.

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Son travail joue sur la frontière entre l’image fixe de la photographie et les effets vidéos. Il tient à préciser que tout ce que l’on voit est réel, le mouvement apposé sur l’image est vrai.

Je représente une partie de la vie de la photo. J’ai essayé d’ailleurs de le reproduire de manière factice, avec Photoshop, mais ce n’était pas du tout pareil, les couleurs ne se mélangent pas de la même manière. Bien sûr, après avoir filmé je dois retravailler un peu l’image pour qu’elle ressorte bien sur la photo, mais elle a une existence concrète auparavant. Ce qui m’intéresse beaucoup dans ce jeu entre la photographie et la vidéo, c’est qu’on peut parfois être à la limite de l’abstrait, avec un souci de composition.

Les personnages de ses œuvres sont surtout ses proches.

J’ai la chance d’avoir de très belles photos de famille sous la main donc j’en utilise beaucoup. Je fais également des achats chez les antiquaires, je trouve cela intéressant de travailler à partir de photos anonymes, mais elles datent souvent d’avant 1950, car sinon elles sont encore au sein des familles. Cela me restreint un peu, car je ne veux pas travailler qu’avec du noir et blanc. Ça dépend vraiment du projet, parfois c’est important que ce soit ma mère ou mon père, et parfois non, et j’utilise les photos seulement parce qu’elles sont intéressantes et conviendraient parfaitement pour tel ou tel projet. Cela dépend de chaque œuvre, de chaque contexte, de chaque photographie. Pour moi, utiliser une photographie pour en faire une œuvre, c’est comme la valider, l’archiver, lui donner une forme d’éternité. S’assurer que l’on s’en souviendra grâce à sa nouvelle vie, et grâce au fait qu’elle soit devenue une œuvre d’art. Bien sûr, lorsqu’il s’agit de mes parents, cela a encore plus d’importance pour moi, mais c’est une sensation personnelle.

 

Jusqu’au 26 juin 2016 au CENTQUATREPARIS,

5 rue Curial 75019 PARIS

Du mercredi au dimanche (hors vacances)

Du mardi au dimanche (en période de vacances)

De 14h à 19h la semaine et 12h à 19h le week-end

 

 

 

Fernell Franco

La Fondation Cartier présente actuellement la première rétrospective européenne consacrée à Fernell Franco, auteur colombien (1942-2006), figure majeure et pourtant méconnue de la photographie latino-américaine.

La photographie est entrée dans sa vie subrepticement. A Cali, ville où il habite sur la côte ouest de la Colombie, Fernell Franco devient à 12 ans coursier pour un laboratoire photo : il explore ainsi les recoins de Cali qu’il commence à s’approprier. En même temps, il se passionne pour le cinéma, passant des journées dans les salles obscures où il découvre les films populaires mexicains, les films noirs américains et le néoréalisme italien qui va influencer son regard. Puis en tant que de fotocinero, il photographie les passants dans les rues, pour leur vendre leurs portraits. Son activité prend une tournure officielle quand il est recruté comme photoreporter pour El País et Diario Occidente, où il couvre les violences et les inégalités de la société, avant de prendre des clichés pour la mode et la publicité pour des magazines comme Elite.

Parallèlement Fernell Franco réalise un travail personnel sur la précarité et les contrastes urbains de sa ville, sur la culture populaire qui s’efface. Il porte un regard nostalgique sur la destruction du patrimoine architectural de Cali et sur la disparition des lieux de jeux et de fêtes, comme ces vieilles salles de billard.

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Fernell Franco  – Série Billares, 1985
Tirage gélatino-argentique d’époque, rehaussé par l’artiste
Collection Motelay © Fernell Franco Courtesy Fundación Fernell Franco Cali / Toluca Fine Art, Paris

L’exposition réunit plus de 140 photographies réalisées entre 1970 et 1996, issues pour la plupart de collections privées. Des tirages originaux, très originaux, parce que Fernell Franco intervenait souvent sur ses photographies, parfois au développement mais surtout directement sur les tirages en les rehaussant au crayon de couleur, à la peinture ou à l’aérographe. Il a expérimenté aussi le collage, le photo-montage.… L’exposition présente souvent plusieurs tirages de la même photo, avec des couleurs, des contrastes ou des cadrages différents.

A voir absolument jusqu’au 5 juin

Fondation Cartier

261 boulevard Raspail – 75014 Paris

Le mardi de 11h à 22 h et du mercredi au dimanche de 11h à 20h

Nicolas Mingasson joue les prolongations

Destins Dolganes, l’exposition photographique de Nicolas Mingasson au
Musée de l’Homme est prolongée jusqu’au 25 avril 2016.

Jeune homme dolgane

Jeune homme dolgane du village de Novorybnoïe ayant revêtu ses habits traditionnels à l’occasion de la fête du soleil qui se tient, chaque année au printemps.

Par ailleurs, samedi 5 mars, à 14h30, sera projeté le film réalisé par Nicolas Mingasson, avec Vincent Gaullier : Portraits d’Arctique, une mission ethnographique au pays des Dolganes
A l’occasion de son dernier travail photographique dans le Taïmyr (Sibérie), Nicolas Mingasson a proposé au jeune ethnographe Yann Borjon-Privé, alors étudiant en première année de thèse, de tenter une expérience originale : faire surgir une parole dolgane en s’appuyant sur des photos d’archives. Aleksandra, vétérinaire à la retraite, Pavel, éleveur de Rennes, Zoïa, infirmière, Vladimir, chasseur,… se sont prêtés au jeu.

Durée : 57 min, Une production Look at Sciences, avec l’Observatoire Photographique des Pôles / Universcience / CNRS Images.
Le film sera suivi d’un débat avec Boris Chichlo, ethnologue au Musée de l’Homme

Entrée libre

Auditorium Jean Rouch

Musée de l’Homme

Place du Trocadéro – 75116 Paris